De l'amitié [ancienne édition]
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‘‘Outre que l’amitié apporte tant et plus de bienfaits, elle les devance tous, rien qu’en baignant l’avenir d’espoir et en prévenant la déchéance ou l’épuisement des nos âmes. Qui contemple son ami contemple donc, pour ainsi dire, son propre reflet. Et grâce à l’amitié, les absents se font présents, les pauvres deviennent riches, les faibles forts et, plus difficile à admettre, les morts reviennent à la vie, tant leurs amis vivent nimbés de leur honneur, de leur souvenir et de leur regret.”
Comment reconnaître un ami ? Dans ce dialogue fictif entre Laelius et ses deux gendres Fannius et Scaevola, Cicéron dévoile sa conception de l’amitié. Laelius y célèbre les qualités de son meilleur ami défunt : Scipion Émilien, brillant intellectuel et éminent homme public.
Nul doute pour Cicéron que la pratique de l’amitié va nécessairement de pair avec celle de la vertu. Pour le grand philosophe, l’amitié ne saurait conduire quiconque au déshonneur. Une amitié authentique ne peut donc exister conjointement à de mauvais agissements. Méfions-nous également des amitiés matérielles, avertit Cicéron. Car l’argent n’est pas moins précaire et instable à l’époque de la Rome antique qu’à celle du cac 40. Or l’amitié requiert au contraire fermeté et solidité, vertus stoïciennes par excellence. L’ami est à l’écoute mais peut lever la voix, y compris pour asséner les vérités les moins agréables ; il cultive la probité et méprise les faux-semblants.
En se fondant sur des exemples tirés de l’histoire romaine, il met en valeur ce qu’il considère comme l’âge d’or de la République, lorsque celle-ci était menée par un groupe d’hommes lié par l’amitié telle qu’il la définit. Car De l’amitié est également un texte de combat, celui que Cicéron mène contre Marc Antoine, et l’amitié un programme politique en soi, afin que la société redevienne vertueuse.
Édition bilingue.
Traduit du latin par Mathieu Cochereau et Hélène Parent.
Cicéron (né en 106 av. J.-C., mort en 43 av. J.-C.) démontra très jeune ses talents d’orateur. Devenu grand avocat de Rome, il connu la gloire lors du procès qui conduisit à la condamnation de Caius Verrès, gouverneur concussionnaire de la Sicile. Au moment où fut établi le droit d’appel au peuple en cas de peine capitale, Cicéron quitta Rome pour éviter une guerre civile. À son retour, il écrivit trois œuvres de philosophie politique : De oratore, De re publica et De legibus.
Pour lui, un homme politique doit avoir une formation universelle, raison pour laquelle on le place à l’origine de l’humanisme tel que conçu à la Renaissance.
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