Une vie de militantisme
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Si les travaux fondateurs de Noam Chomsky en linguistique l’ont hissé dès les années 1950 au statut d’intellectuel de premier plan, c’est sa défense radicale de la liberté et de la raison qui l’a révélé au grand public. Cet ouvrage s’intéresse d’ailleurs précisément à la dimension militante de sa carrière.
Une vie de militantisme a le grand mérite de mettre en lumière le parcours d’« un citoyen qui propose une vision positive du changement social et joue son rôle de militant de façon exemplaire sur plus d’un front ». À la faveur d’entretiens qu’il a accordés à Charles Derber, Suren Moodliar et Paul Shannon, le célèbre linguiste revient en effet sur les diverses causes qu’il a appuyées au cours de sa carrière et relate plusieurs événements marquants dont il a été témoin lors de ses voyages aux quatre coins du monde. Ainsi, des premières conférences qu’il a données dans les années 1940 – où il s’intéressait déjà au sort de la Palestine – jusqu’à sa visite au Brésil en 2018 – au cours de laquelle il a contribué à conscientiser l’opinion publique à la menace croissante que la droite faisait peser sur la démocratie de ce pays –, c’est littéralement le récit de toute une vie consacrée au militantisme qui nous est raconté.
Fort de cette longue et riche expérience, Chomsky se prononce également sur la santé des mouvements sociaux actuels. Ses paroles empreintes d’optimisme donneront de l’espoir au lecteur désabusé : « Il y a beaucoup d’activité militante aujourd’hui. Le nombre de personnes impliquées est probablement plus élevé qu’il ne l’a jamais été. Beaucoup plus élevé que dans les années 1950. » Mais à l’image des membres de la société, ces regroupements seraient isolés les uns des autres : cette absence de coordination, affirme-t-il, est en grande partie attribuable au fait que le mouvement syndical a été dompté, voire écrasé, alors qu’il était autrefois dynamique et à l’avant-garde des différentes formes de contestation. Or, rappelle-t-il opportunément, les périodes où celui-ci a disposé d’une véritable force de frappe sont celles où il est parvenu, dans une certaine mesure, à combler le fossé entre les classes sociales. Chomsky appelle donc la gauche progressiste à favoriser les contacts avec la population et à faire tout ce qui est en son pouvoir pour que convergent la lutte des classes et les luttes identitaires : « [O]n peut surmonter les différences culturelles en mettant en évidence des préoccupations partagées et des intérêts communs ». Or, les enjeux majeurs auxquels les différents mouvements peuvent se rallier ne manquent pas : l’environnement, la menace nucléaire et la montée de la droite n’en constituent que quelques exemples.
Noam Chomsky est professeur émérite au Massachussets Institute of Technology. Il est célèbre dans le monde entier pour ses écrits en linguistique, ses analyses des médias et ses critiques de la politique internationale des États-Unis.
Charles Derber est professeur de sociologie au Boston College.
Suren Moodliar est directeur en chef de Socialism and Democracy.
Paul Shannon est gestionnaire du programme Paix et sécurité économique de l’American Friends Service Committee.
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