Comparution
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En sortant du palais de justice pour la dernière fois, je n’ai pas essuyé mes larmes. Devant moi, j’ai cru voir la place Tiān’ānmén, le potager de yéye et les palmiers d’Hawaï. Mais ce n’était que la station Place-d’Armes. Ma mémoire m’avait trahie, une fois de plus.
Lorsqu’on m’a demandé, en 2020, de remplir une déclaration de la victime, je n’avais plus rien à perdre. Une section, à la fin du cahier, s’intitulait : Dessin, poème ou lettre. J’ai lu la consigne : « Vous pouvez utiliser cet espace si cela peut vous aider à dépeindre les répercussions que l’infraction ou la conduite de l’accusé a eues sur vous ». J’ai très vite dépassé le nombre de lignes. Il n’y avait pas assez de place pour parler de la Chine, de mon français étrange, de l’histoire d’amour qui a précédé la plainte. Quatre ans plus tard, je suis arrivée à cette version. J’ai essayé de ne pas faire de fautes. La vérité, elle, m’échappe encore.
Angelina Guo est née à Montréal en 2001. Elle vit à Paris, où elle prépare un master en littérature française à l’université de la Sorbonne et à l’École normale supérieure. On peut lire ses textes dans les revues Estuaire et Tristesse, et sur le site de La poésie partout. Comparution est son premier livre.
NB : Les prix indiqués sont sujets à changements sans préavis.
