A qui appartient l'eau?
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L’eau, ressource vitale, doit revenir entre les mains du public pour enrayer les pénuries présentes et à venir
Maude Barlow est une militante de la première heure pour le droit à l’eau. Elle a arpenté les conférences des Nations Unies à la défense de l’eau comme bien commun et est allée à la rencontre des communautés fragilisées par leur manque d’accès à l’eau. Pour elle, le droit à l’eau et le besoin de la protéger à son état naturel sont interconnectés, écologie et droits de la personne y sont étroitement liés. Car plus nous malmenons l’eau, en la pompant de façon excessive et en la polluant, le moins il en restera à partager équitablement. Et, lorsqu’il n’y en aura plus suffisamment, les plus vulnérables seront touchés les premiers et les plus durement. « Comprendre cette interconnexion a renforcé ma détermination à lutter contre le contrôle privé de l’eau sur la planète, sous toutes ses formes. » nous dit Maude Barlow.
Fidèle à sa mission, elle fait ici le point sur l’urgence de préserver les ressources en eau de la privatisation et de se mobiliser dans chaque communauté pour se réapproprier cette ressource vitale. Car l’heure est grave. En 2016, ONU Environnement a qualifié la pénurie d’eau de « fléau de la Terre » et l’a reliée directement à la dégradation continue par l’humanité des terres et des forêts qui assurent le renouvellement de la planète en eau douce. En mars 2018, ONU-Eau lançait une sombre mise en garde : si nous ne changeons pas nos habitudes, plus de cinq milliards d’habitants pourraient souffrir de graves pénuries d’eau dans 30 ans. À l’heure actuelle, 3,6 milliards de personnes vivent déjà dans des régions déficitaires en eau pendant au moins un mois par année et ce chiffre pourrait passer à 5,7 milliards de personnes d’ici 2050. À cela s’ajoute des enjeux sanitaires. Un rapport publié en avril 2017 par l’OMS soulignait qu’au moins deux milliards de personnes dans le monde boivent chaque jour de l’eau contaminée par des excréments, tuant plus d’un demi-million d’entre eux par année. L’organisme WaterAid affirme que la diarrhée causée par l’eau contaminée et l’absence de toilettes décentes tue un enfant de moins de cinq ans toutes les deux minutes.
Comment en sommes-nous arrivés là? L’accaparement éhontée des ressources hydriques par les compagnies privées, que ce soit pour l’embouteillage ou par la privatisation des services publics d’eau, est à la source de ce sombre tableau. Maude Barlow en détaille les principaux acteurs (Véolia, Suez, Coca-Cola, Nestlé) et l’impact de la captation des ressources hydriques sur les populations. Son livre raconte aussi l’histoire d’une campagne populaire contre l’idée que la meilleure façon de régler la crise consiste à marchandiser l’eau et à laisser au marché le soin de contrôler son accès. Après des nombreuses batailles, la majorité des pays faisant partie des Nations Unies ont enfin reconnu l’eau et les services d’assainissement comme des droits humains fondamentaux. Localement, des communautés bleues ont émergé aux quatre coins de la planète. Un nombre sans cesse croissant de municipalités et d’institutions de la société civile se sont engagées à défendre le droit à l’eau et à restreindre la contamination du plastique au sein de leurs communautés. Démarré au Canada, le projet s’est répandu ailleurs dans le monde : Berne, Paris, Thessaloniki et Berlin ont emboîté le pas.
La mobilisation pour préserver cette ressource vitale est déjà là, il faut la poursuivre. Dans ce vibrant plaidoyer pour démocratiser la protection de l’eau, Maude Barlow en appelle à un monde plus bleu, une communauté à la fois.
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