Ta mère est une sorcière
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Je commence ici mon récit, avec l’aide de mon voisin Simon Satler, car je ne sais ni lire ni écrire. Je maintiens que je ne suis pas une sorcière, que je n’ai jamais été une sorcière et que je ne suis apparentée à aucune sorcière. Dès mon plus jeune âge, cependant, j’ai eu des ennemis.
Tout le monde connaît Johannes Kepler, le mathématicien et astronome qui a donné son nom aux lois du mouvement des planètes. Mais avez-vous déjà entendu parler de sa mère, Katharina? Pourtant, en 1618 à Leonberg, petite bourgade allemande accablée par la peste, les mauvaises récoltes et la crainte d’une nouvelle guerre, personne n’ignore qui elle est. Il faut dire qu’avec sa manie de mettre son nez dans les affaires des autres et d’offrir à n’importe qui de mystérieux remèdes, cette vieille veuve illettrée attire autant l’attention que la suspicion.
Alors quand l’insipide Ursula Reinbold, la femme du vitrier, l’accuse sans la moindre preuve de l’avoir empoisonnée avec un brouet de sorcière, c’est bientôt la ville entière qui lui impute tous les maux. Pour tenter d’échapper à la vindicte publique, à la torture et au bûcher, Katharina n’aura d’autre choix que de s’appuyer sur ses quelques soutiens – ses enfants et sa vache Camomille – et de livrer sa version des faits en espérant que certains se soucient encore de la vérité.
Dans ce roman baroque à souhait, délicieusement écartelé entre archaïsme et modernité, gravité et humour absurde, récit historique et satire morale, Rivka Galchen nous entraîne dans une chasse aux sorcières à la résonance étonnamment contemporaine. Car aussi éloignés de nous qu’ils puissent paraître, les tourments de Katharina Kepler sont avant tout ceux d’une femme à la parole bafouée et battue en brèche pour préserver l’impunité des puissants et nourrir les peurs irrationnelles des ignorants.
Traduit par Lori Saint-Martin et Paul Gagné.
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