L’enjeu n’est pas de s’engager chaque jour sur les chemins de terre ou les routes asphaltées. Il est de conserver en soi l’esprit pérégrinant. Le mouvement dans l’espace renvoie à une disposition intérieure ; conditionné par elle, il la rend visible. C’est bien là une façon de vivre le symbole qui réunit et rend indissociables l’ordre sensible et l’ordre invisible. Je risquerai cette douteuse formule : la connaissance, comme la marche, se prouve en marchant. Plus exactement elle se fait et s’éprouve en marchant. Comprenons bien sûr que c’est là passer du littéral au figuré !
 
Le plus infime mouvement modifie le point de vue. À grande échelle, les points de vue deviennent innombrables, telles les routes qui sillonnent forêts et jardins, bords de mer et montagnes, maints endroits déjà visités par Roland Bourneuf dans Venir en ce lieu. Pour l’heure, l’esprit des lieux se double de l’esprit pérégrinant, cette disposition particulière de celui qui suit pas à pas le cheminement de la pensée, à l’égal du déplacement dans l’espace. L’écriture, qui tisse des liens entre le concret et l’imaginaire (images, symboles ou allégories de l’existence), trouve sa plénitude dans cette intime alliance.

Ainsi, à Percé ou à Riom, au souvenir d’un voyage au Tibet ou des toiles des grands maîtres, sur les traces du Wanderer, de l’errant et du pèlerin, s’arrêtant au cloître, près de l’abri ou sur le seuil, l’essayiste repère et sonde dans l’ici et là de sa mémoire, trie et s’interroge sur l’air du temps et le temps perdu. Avec l’entêtement d’un Perceval, il fait de la clairvoyance l’indispensable bagage du voyageur qui pense.

NB : Les prix indiqués sont sujets à changements sans préavis.