Quelque chose se détache du port
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Les poèmes de Quelque chose se détache du port, loin de la limpidité douteuse du sens commun, fonctionnent sous l'impulsion d'une série de stratégies obliques, qui traversent l'expérience et la transforme selon divers axes: ceux de l'aphorisme autiste, d'une narration angulaire et minimale, de la spéculation et de l'inventaire. D'un lyrisme narquois, ils se lisent comme l'énonciation énigmatique d'un problème: de vie, de langage, de pensée.
L'écriture de Farah s'occupe de sens; de fait, elle en délivre, mais du sens irrésolu et rusé, effectif, qui oriente et désoriente à la fois, invite à jouer de la lecture. C'est dire que l'auteur pratique un art tendu, celui de l'esquive qui expose – par charges et recharges, touches et retouches – dans des phrases-traits où la légèreté de ton est l'habit de la précision. Ce langage calibré n'est pas celui de la quête de soi, mais le chant littéral dubitatif, étranger aux sirènes métaphysiques, d'une enquête sur ce que le soi absorbe. Sorte de traduction d'une langue par elle-même dans elle-même, de «translation» procédant par sauts qualitatifs, Quelque chose se détache du port est une circumnavigation en bassin de synthèse où des éléments biographiques, des allusions politiques ou historiques constituent le fond à traiter, d'où «se détachent» des poèmes. Trickster pudique et combatif, Farah adresse à l'époque une lettre de malaise carabiné – lettre dont il est le simple et timbré porteur.
Quelque chose se détache du port a été finaliste au prix Émile-Nelligan 2004.
Àlain Farah, né à Montréal en 1979, poursuit des études doctorales en littérature. Ses poèmes sont parus dans plusieurs revues, notamment Exit, Horizon Zéro et Fusée. Cofondateur de la revue C'est selon, il a collaboré à deux ouvrages collectifs portant sur les liens qu'entretiennent la poésie et le politique. Quelque chose se détache du port est son premier livre.
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