La figure du touriste évoque généralement un individu un peu naïf, vêtu de ses éternels bermudas, parcourant à la hâte des pays qu'il n'a le temps de voir que dans l'écran de son appareil photo, et qu'il est par conséquent de bon ton, dans notre société toujours plus branchée, plus mondialisée et plus conscientisée, de vaguement mépriser. Mais c'est oublier que le touriste emprunte aujourd'hui des formes beaucoup plus diverses — explorateur écolo, voyageur bobo, vacancier de luxe, travailleur humanitaire, festivalier, consommateur de « produits » culturels — dont il est loin d'être sûr qu'elles se distinguent fondamentalement de celle que nous nous plaisons tant à caricaturer. Ou, si elles se distinguent, c'est par aggravation, car dans ses incarnations nouvelles et lénifiantes le touriste moderne a perdu la conscience qu'il est un touriste et ignore que le monde touristifié, à travers lui, ne cesse d'accroître son étendue.

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